Au Sénégal, la baguette menacée par le coronavirus



Pour des raisons d’hygiène, les autorités envisagent d’interdire la vente de pain dans les épiceries de quartier. 








Le coronavirus va-t-il priver les Sénégalais de la baguette présente à quasiment tous leurs repas ? Les autorités envisagent en tout cas d’en interdire la vente dans les épiceries de quartier. Or c’est dans ces échoppes, omniprésentes, que sont écoulés, avec cigarettes et produits d’entretien, les trois quarts des 8 millions de baguettes produites chaque jour au Sénégal.

« Le ministère du commerce vient d’interdire la vente de pain dans les boutiques. Une mesure prise pour limiter la propagation de l’épidémie », a indiqué le ministère en question, mardi 17 mars, sur Twitter. Le message a ensuite été nuancé par le ministère, semant le doute.

Interdire la distribution en épicerie toucherait directement nombre de Sénégalais, qui consomment en moyenne une demi-baguette par jour, selon les industriels réunis au sein de la Fédération des boulangeries du Sénégal. Relativement bon marché (150 francs CFA, soit 0,23 euro), la baguette se vend en boulangeries et grandes surfaces, mais aussi, à raison de 75 % de la production, dans les petites épiceries, selon la fédération.

Un coup d’œil sur le fonctionnement d’un de ces magasins de quelques mètres carrés à Dakar révèle la préoccupation sanitaire. Le commerçant réceptionne bien les baguettes avec des gants. Mais peu après, il les vend à un client enveloppées dans du papier journal. Ou, sans plus de gants, il les tartine d’une pâte chocolatée pour un autre acheteur.

Interdire le pain dans les épiceries « sera compliqué pour nous », s’inquiète Mohamed Diallo, un commerçant guinéen de Dakar. Il craint le manque à gagner, de 10 à 15 francs CFA par baguette.
Le gouvernement a décidé en décembre d’interdire la vente en épicerie pour des raisons d’hygiène. Cette décision est jusqu’à présent restée lettre morte, malgré les appels des industriels et des associations de consommateurs. L’apparition du nouveau coronavirus au Sénégal, début mars, a semble-t-il poussé les autorités à serrer la vis. Une trentaine de cas ont été répertoriés, mais aucun décès rapporté, et le gouvernement a pris une série de mesures fortes.


Mercredi, on pouvait toujours acheter sa baguette chez l’épicier à Dakar, ont constaté des journalistes de l’AFP. L’interdiction annoncée mardi est en fait une « recommandation » faite par la Fédération des boulangeries. « On travaille sur le dossier », dit le directeur du commerce intérieur au sein du ministère, Ousmane Mbaye. L’Etat a« reculé, nous allons riposter », s’insurge le président de la Fédération des boulangeries, Amadou Gaye, qui invoque le transport du pain dans des sacs insalubres et sa manipulation à mains nues.

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